La création monétaire :
L’offre de monnaie est la quantité de monnaie détenue par les agents.
Offre de monnaie = pièces de monnaie et billets + dépôts à vue bancaires.
M = C + D
L’offre de monnaie est déterminée par la politique de la banque centrale, mais aussi par le comportement des ménages et des banques commerciales. La création de monnaie est très différente selon que l’on se trouve dans un système avec réserves intégrales (A) ou avec réserves fractionnaires (B). C’est dans ce dernier cas qu’apparaît le multiplicateur de crédit.
A – Le système bancaire avec réserves intégrales
Supposons que dans une économie sans banques, les pièces et billets en circulation constituent la totalité de la monnaie. Supposons qu’elle soit égale à 1 000$.
Introduisons maintenant les banques, mais des banques dont le seul rôle est de conserver en toute sécurité l’argent que les gens déposent auprès d’elles : elles ne reprêtent pas cet argent.
Réserves bancaires = partie des dépôts constitués auprès des banques que celles-ci ne prêtent pas.
Système avec réserves intégrales = 100% des dépôts reçus par les banques sont placés en réserve et y restent jusqu’au moment où un retrait est effectué ou un chèque émis.
Supposons que la population dépose la totalité des 1 000$ auprès de la Primobanque.
La Primobanque ne consent pas de prêts.
Bilan d’une banque avec réserves intégrales
Actif (ce qu’elle possède) | Passif (ce qu’elle doit) |
Réserves 1 000$ | Dépôts 1 000 $ |
Quelle est l’offre de monnaie dans cette économie ?
Avant la création de la Primobanque, O de monnaie = 1 000$ = pièces et billets en circulation.
Après la création de la Primobanque, O de monnaie = 1 000$ = dépôts.
Chaque $ déposé dans une banque réduit la monnaie en circulation de 1 $ et accroît les dépôts de 1 $. L’offre de monnaie reste inchangée.
Si les banques détiennent 100% des dépôts sous forme de réserves, le système bancaire n’affecte pas l’offre de monnaie.
B – Le système bancaire avec réserves fractionnaires
Système avec réserves fractionnaires = les banques se mettent à prêter une partie de leurs dépôts. Ceci intéresse les banques car elles peuvent prélever un taux d’intérêt sur les prêts consentis. La banque ne doit conserver en réserves qu’une partie des dépôts, pour permettre à ses clients d’effectuer des retraits lorsqu’ils le souhaitent.
Supposons ici que le coefficient de réserves – la partie des dépôts conservée par la banque au titre des réserves – soit de 20%. La Primobanque conserve donc 200$ et prête les 800 restants.
Bilan d’une banque avec réserves fractionnaires
Bilan de la Primobanque
Actif | Passif |
Réserves 200 $ Prêts 800 $ | Dépôts 1 000 $ |
En prêtant 800$, la Primobanque accroît l’offre de monnaie d’un même montant. Après le prêt, l’offre de monnaie est de 1 800$ : le déposant dispose de 1 000$ et l’emprunteur de 800$.
=> Dans un système avec réserves fractionnaires, les banques créent de la monnaie.
Cette création monétaire ne s’arrête pas à la Primobanque. L’emprunteur va utiliser les 800$ pour payer des tiers (fournisseurs) qui les déposent à leur tour, par exemple dans une autre banque, la Duobanque. Celle-ci conserve 20% sous forme de réserves (160$) et prête à son tout 640$. La Duobanque crée 640$ de monnaie.
Bilan de la Duobanque
Actif | Passif |
Réserves 160 $ Prêts 640 $ | Dépôts 800 $ |
Ces 640$ seront à leur tour déposés auprès de la Triobanque, celle-ci en conservera 20% en réserves, soit 128 $ et pourra prêter 512 $, accroissant d’autant l’offre de monnaie.
Ce processus se poursuit indéfiniment, mais il ne crée pourtant pas une quantité infinie de monnaie. En notant r le coefficient de réserves, on peut calculer la quantité totale de monnaie qui sera crée par un dépôt initial de 1 000 $ :
Dépôt initial = 1 000 $
Prêt de la Primobanque = (1-r).1 000 $
Prêt de la Duobanque = (1-r)².1 000 $
Prêt de la Triobanque = (1-r)3.1 000 $
Etc.
Offre totale de monnaie = 1 000 [1 + (1-r) + (1-r)² + (1-r)3 + … + (1-r)n ] = 1 000 [ [1/1-(1-r)] = 1 000(1/r)
Note : la somme d’une série géométrique infinie, pour x compris entre –1 et 0, est
1 + x + x² + … = 1/1-x
Comme r = 0.2, 1/r = 5 et offre de monnaie = 5.1000 = 5 000 $.
Les 1000 $ initiaux génèrent 5000 $ de monnaie.
N.B : le système bancaire avec réserves fractionnaires crée de la monnaie, non de la richesse. Pour l’individu qui emprunte, l’argent obtenu par le prêt constitue une dette vis à vis de la banque ; l’individu n’est pas plus riche. La création de monnaie par le système bancaire accroît la liquidité de l’économie, pas sa richesse.
C – Un modèle d’offre de monnaie avec réserves fractionnaires :
Appelons C la valeur des pièces et billets en circulation, D le montant des dépôts à vue, R le montant des réserves bancaires.
Le modèle comporte 3 variables exogènes :
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La base monétaire B = C + R. La banque centrale la contrôle directement. On parle aussi de monnaie banque centrale.
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Le coefficient de réserves r = fraction des dépôts que les banques conservent sous forme de réserves = R/D. Elle dépend des pratiques commerciales des banques et de la réglementation bancaire.
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Le coefficient d’encaisses c = part de leurs dépôts à vue que les gens souhaitent détenir en espèces = C/D. Il traduit les préférences des gens quant aux formes de détention de la monnaie.
L’offre de monnaie : Mo = C + D
La base monétaire : B = C + R
Pour trouver l’offre de monnaie en fonction des 3 variables exogènes, divisons la 1ère équation par la seconde :
Mo/B = C + D / C + R = (C/D + 1) / (C/D + R/D) = c + 1 / c + r
En déplaçant B vers le membre de droite de l’équation, nous obtenons :
Mo = B . (c + 1)/(c + r)
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L’offre de monnaie est proportionnelle à la base monétaire.
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On note m la valeur du multiplicateur monétaire : m = c + 1/ c + r
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Mo = m.B
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Chaque $ de base monétaire produit m dollars de monnaie.
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Voici un exemple numérique tiré de la situation actuelle des USA. La base monétaire est de 500 milliards de $, r = 0.1 et c = 0.6.
m = 0.6 + 1 /0.6 + 0.1 = 2.3. Offre de monnaie = 500. 2,3 = 1 150 milliards de $.
Les 3 variables exogènes modifient l’offre de monnaie :
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Toute variation de B entraîne une modification dans le même sens de Mo.
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Toute baisse de r accroît l’offre de monnaie
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Toute baisse de c accroît l’offre de monnaie. Mo = C+D ; si S baisse, D augmente et les possibilités de prêts augmentent (si c=0.5, m=2.5)
La banque centrale contrôle l’offre de monnaie, mais indirectement.
Elle agit sur la base monétaire à travers 2 instruments :
- les interventions sur le marché monétaire (open-market) : achats et ventes d’obligations d’Etat par la banque centrale.
Quand elle achète des obligations d’Etat, elle accroît la base monétaire et l’offre de monnaie.
Quand elle vend des obligations d’Etat, elle diminue la base monétaire et l’offre de monnaie.
C’est l’instrument le plus utilisé.
- le taux d’escompte : taux d’intérêt que prélève la banque centrale quand elle consent des prêts aux banques commerciales. Celles-ci empruntent auprès de la banque centrale lorsque leurs réserves sont insuffisantes pour respecter le coefficient de réserves obligatoires. Plus le taux d’escompte est faible, moins il est coûteux d’emprunter auprès de la banque centrale et plus les banques commerciales ont recours à cette modalité de financement et accroissent l’offre de monnaie.
Elle agit aussi sur les réserves obligatoires : réglementation par laquelle la banque centrale oblige les banques commerciales à respecter un coefficient de réserves minimal.
Hausse de r => baisse de m => baisse de l’offre de monnaie.
Instrument le moins utilisé de nos jours.
En dépit de ces 3 instruments, ce contrôle de l’offre de monnaie est imparfait. Les banques ont une certaine liberté dans leurs pratiques commerciales, ce qui explique des variations de l’offre de monnaie non voulues par la banque centrale. Ainsi :
- les banques peuvent décider de détenir des réserves qui dépassent le niveau des réserves obligatoires, ce qui pèse négativement sur l’offre de monnaie.
- la banque centrale ne contrôle pas avec précision les quantités d’argent empruntées par les banques commerciales au guichet de l’escompte.