3- Le passage de la valeur au prix de production :
Marx affirme que les rapports d’exploitation son occultés : l’observateur peut voir les prix mais non les valeurs, le taux de profit mais non le taux de plus value.
a) Le taux de profit :
Ce qui intéresse le capitaliste, c’est la rémunération perçue par rapport à la masse des capitaux avancés, c’est donc le capital total qu’il faut prendre en compte.
Taux de profit = pl / [C + V]
b) Les prix de production :
Il y a un écart entre la valeur et ce que Marx appelle le prix de production.
Les marchandises ne sont pas vendues à leur valeur car il en résulterait des taux de profit très différents suivant les secteurs. Un taux de profit uniforme va s’appliquer à l’ensemble des secteurs. Cela signifie que chaque capitaliste, quelle que soit la branche, reçoit une part de profit proportionnelle à son capital => chaque capital individuel est une fraction du capital total qui, à ce titre, réclame une partie de la plus value.
Exemple : l’économie est divisée en 3 secteurs.
Secteur | Capital constant | Capital variable | Plus value | Valeur | Taux de profit | Prix de production |
1 | 3000 | 1000 | 1000 | 5000 | 20% | 4800 |
2 | 4000 | 1000 | 1000 | 6000 | 20% | 6000 |
3 | 5000 | 1000 | 1000 | 7000 | 20% | 7200 |
Ensemble | 12000 | 3000 | 3000 | 18000 | 20% | 18000 |
Taux de plus value : 3000/3000 = 100%
Taux de profit : 3000/(12000+3000) = 20%
Ce taux de profit moyen va s’imposer à tous les capitalistes en vertu de la concurrence (selon des modalités complexes et confuses d’après Abraham-Frois) et va déterminer les prix de vente des marchandises. Pourquoi le terme prix de production ? le capitaliste ajoute à la valeur des moyens de production utilisés, un montant de profits correspondant au taux de profit global.
Prix de production : Pi = Ci + Vi + r(Ci + Vi) = (1 + r) (Ci + Vi) où i représente un secteur
P1 = (1 + 20%) (3000 + 1000) = 4800
P2 = (1 + 20%) (4000 + 1000) = 6000
P3 = (1 + 20%) (5000 + 1000) = 7200
Pour l’ensemble de l’économie, la somme des prix est égale à la somme des valeurs.
Ces prix de production sont le centre de gravité autour duquel oscilleront les prix de marché suivant l’offre et la demande.
Si les marchandises s’échangeaient en proportion de leur valeur, le taux de profit serait différent selon les secteurs :
-
: 1000/4000 = 25%
(2) : 1000/5000 = 20%
(3) : 1000/6000 = 16.66%
Les prix de production assurent la péréquation des taux de profit.
La loi de la valeur se manifeste indirectement : transformation des valeurs en prix de production.
c) L’erreur de Marx :
Expression du prix de production : Pi = (1 + r) (Ci + Vi) :
Le même bien est donc évalué de 2 façons différentes. A droite on a le bien évalué en valeur quand il rentre dans le processus de production, à gauche le même bien évalué en prix quand il en sort. Mais il est impossible qu’un même bien soit vendu à un prix différent de celui auquel il a été acheté. Marx en était conscient mais pensait qu’il s’agissait d’une approximation sans conséquence. En fait, il n’en est rien.
On peut certes modifier l’expression précédente des prix de production de façon à évaluer le capital constant et le capital variable en prix de production Pi = (1 + r) (Cpi + Vpi) ; mais ce système n’a pas de solution si on prend le taux de profit r tel que Marx l’a défini. Pour rendre le système cohérent, il faut introduire un taux de profit différent de r : Pi = (1 + R) (Cpi + Vpi) ; il y a alors détermination simultanée du taux de profit et de l’ensemble des prix de production.
=> la formule donnée par Marx lui-même du taux de profit r, à savoir (pl/C + V), est fausse.
C) Accumulation et crises dans le MPC :
Le capitalisme est une machine à capitaliser la plus value. Il s’agit de transformer l’argent en capital nouveau. Le capitalisme se résume au cycle : A-M-A’ (où A est l’argent et M la marchandise et A’=A + pl), c’est à dire à la formule « vendre pour acheter ».
On accumule en capitalisant la plus value.
1) L’accumulation du capital :
On observe un accroissement continu du capital investi par travailleur employé : hausse de la composition organique du capital C/V.
Causes : progrès des forces productives, hausse de la productivité du travail, progrès technique, concurrence entre les firmes.
Effets :
1- chômage. Baisse des besoins en travail due au progrès technique, que ne peut compenser la hausse de la demande de travail due à la hausse des débouchés.
-
apparition de surnuméraires => constitution d’une armée de réserve industrielle dans laquelle, en cas d’expansion, les capitalistes pourront puiser sans augmenter les salaires.
-
loi de surpopulation relative : le chômage et la misère ouvrière ne sont pas des phénomènes naturels (contrairement à ce qu’affirme Malthus) mais sont la conséquence du fonctionnement du MPC. Illustration : révoltes des canuts lyonnais, luddisme en GB.
2- polarisation de la société entre une minorité de plus en plus riche et une majorité de plus en plus pauvre
3- contradiction entre la socialisation des forces productives (la production est réalisée non par des individus isolés mais par des collectifs) et le caractère privé des moyens de production (une petite minorité monopolise le pouvoir économique car elle concentre les moyens de production).
2) Les crises de surproduction :
La formule générale du capital A-M-A’ (« acheter pour vendre ») est révélatrice de la possibilité de crises.
Causes :
1- le produit doit être vendu pour que la réalisation de la plus value ait lieu effectivement (faute de quoi le travailleur aurait été exploité sans que le capitaliste touche quoi que ce soit)
2- il faut ensuite que l’argent récupéré soit relancé dans le circuit pour qu’un nouveau cycle de production puisse repartir
3- compte tenu du grand nombre d’échangistes et du nombre de cycles se déroulant de façon plus ou moins simultanée, il y a de façon permanente la possibilité d’un arrêt partiel de l’échange (si les ventes se font mal, si les profits attendus sont faibles).
Marx a la conception suivante du MPC : les capitalistes prennent des initiatives anarchiques et désordonnées, le marché effectue à posteriori une régulation, absorbant ou rejetant les productions déversées par les capitalistes.
Déroulement :
offre > demande => mévente => baisse des prix et du profit => contraction des échanges => baisse de l’investissement => faillites, licenciements.
La crise peut être durable en raison des difficultés techniques de reconversion de certains capitaux.
De la crise surgissent des éléments de solution :
- destruction des capacités de production excédentaires, maintien des firmes les plus productives
- baisse des prix => hausse de la demande
- chômage => pression à la baisse sur les salaires => hausse de la rentabilité
- innovations mises en œuvre par les firmes les plus performantes (la plus value extra est celle obtenue à la suite d’une innovation)
- concentration et hausse de la taille des firmes (absorption de firmes en difficulté)