La surcapitalisation chez F. Von Hayek Prix et production, 1931.
Résumé :
La marche normale de l'économie est l'équilibre, le cycle traduit une perturbation. Le crédit est l'élément perturbateur.
Il arrive que le taux d'intérêt baisse en dessous de son taux naturel, c'est-à-dire celui qui égalise la demande et l'offre issue de l'épargne volontaire,
Cette baisse des taux peut avoir 2 causes : une hausse de la préférence pour le futur (hausse de l'épargne) et une hausse de la création monétaire.
Dans les 2 cas, les entreprises augmentent leurs investissements. Le cycle est engendré si c'est la 2ème cause qui joue. Quand cette production arrive sur le marché elle ne correspond pas à une consommation supplémentaire. La crise commence.
Explication :
L'économie est divisée en 2 secteurs : les biens de consommation et les biens de production, ces derniers constituant un détour de production. La répartition entre les 2 secteurs représente la structure de production. Cette structure peut se déformer selon 2 scénarios, la variation de l'épargne ou la variation de la quantité de monnaie. Mais ces 2 scénarios ne sont pas équivalents, le premier type de déformation de structure de production est durable car il résulte d'un nouveau comportement des épargnants alors que le second est provisoire.
1- Hausse de l'épargne
Elle entraîne une baisse de la consommation et une hausse de l'investissement.
La production est plus capitalistique, le détour de production s'allonge (Böhm-Bawerk).
Le prix relatif des biens de production / biens de consommation augmente
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baisse de la marge bénéficiaire des producteurs de biens de consommation
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ces producteurs déplacent une partie de leurs facteurs de production vers la production de biens de production
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l'offre accrue de biens de production correspond à une hausse de la demande ; de la même manière il y a baisse de l'offre et la demande de biens de consommation
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après une première modification, les prix relatifs se stabilisent
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la déformation de la structure de production est durable, l'économie n'est pas en crise
2- Hausse de la masse monétaire
L'abondance monétaire pousse les entreprises à investir. La production devient plus capitalistique, le détour de production s'allonge. L'offre de biens de consommation a diminué alors que la demande de biens de consommation est restée la même.
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pénurie des biens de consommation
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hausse du prix relatif des biens de consommation
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incitation à utiliser des méthodes moins capitalistiques
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ceux qui avaient accru leurs équipements sont en surcapacité, la surcapitalisation survient. Il s'agit d'un surinvestissement = investissements qui s'avèrent non rentables
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l'économie produit trop de biens de production et pas assez de biens de consommation
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quand la production arrive sur le marché elle ne correspond pas à une consommation équivalente ; la crise commence
Conclusion :
Pour Hayek, une baisse du taux d'intérêt sans origine réelle - c'est-à-dire sans hausse de l'épargne - signifie qu'un signal erroné est envoyé aux entrepreneurs. Or les mauvais signaux entraînent de mauvaises décisions.
Cf. la politique de bas taux d'intérêt de la FED après le e-krach au début des années 2000 qui a inondé le monde en liquidités et favorisé la bulle immobilière qui a commencé à éclater aux USA en 2007.
Portée et limites de l'analyse marxiste de la crise du dernier quart du 20ème siècle.
Quelques repères :
* Baran et Sweezy : le capitalisme monopoliste (1966)
Au concept de plus-value de Marx, ils proposent de lui substituer celui de surplus, défini comme la différence entre ce que produit une économie et ce que coûte cette production. Le développement du capitalisme, dans lequel une poignée d'entreprises géantes dominent l'économie et fixent leurs prix, entraîne non pas la baisse du profit mais la hausse du surplus que l'économie ne parvient pas à absorber. Telle est la racine de la stagnation. Moyens d'absorber ce surplus : les efforts de publicité, les dépenses gouvernementales en particulier militaires liées à l'extension de l'impérialisme.
* Boccara : Théorie du capitalisme monopoliste d'Etat (1974)
Le capitalisme se heurte à une crise de suraccumulation c'est-à-dire d'excédent de capital par rapport à la masse des profits, freinant la croissance et développant le chômage. Cette crise se manifeste dès la fin des années 1960. L'action de l'Etat consiste à dévaloriser certains capitaux afin de rétablir le taux de profit. Cette intervention prend diverses formes : financement public privilégié, nationalisation, transfert au privé d'entreprises ou de secteurs redevenus rentables.
* Le Pors : Les béquilles du capital (1977)
Si les marxistes s'opposent à la privatisation des profits, ils s'opposent aussi à la socialisation des pertes. Les subventions sont un moyen utilisé par les grandes entreprises pour lutter contre la baisse tendancielle du taux de profit. Ex : aides à la sidérurgie, au textile, aux chantiers navals en France dans les années 1970. Un remake de l'Etat au service de la grande bourgeoisie.
* Mandel (1982) : La crise doit s'analyser dans le cadre des ondes longues : le déclin et la restauration des taux de profit sont le moteur des cycles longs.
Portée :
- la vision de long terme de la crise : c'est une crise structurelle et non pas une récession banale un peu plus accentuée que les autres, elle représente un tournant historique dans l'évolution du capitalisme. Or aussi bien les monétaristes que les keynésiens ont tendance à considérer que l'économie est une machine dont le régime s'accélère ou se ralentit périodiquement, selon un cycle déterminé. Pour les marxistes les crises sont inévitables pour purger l'économie et restaurer les profits.
- l'explication de la crise : la crise ne résident provient pas de facteurs exogènes (cartel de l'OPEP, erreurs de politique économique) mais de la baisse tendancielle du taux de profit (BTTP). Le boom économique entraîne une hausse des salaires (tensions sur le marché du travail) supérieure aux gains de productivité (pénurie de matières premières), donc une baisse des profits. De plus, l'intensification dans l'utilisation du capital en raison de la concurrence (les NPIA) favorise la baisse du taux de profit.
- l'analyse des politiques menées : pour lutter contre le BTTP, les gouvernements versent des subventions aux grandes entreprises (cf. l'aide de l'Etat français à Alstom en 2003) et pratiquent des politiques de rigueur afin de restaurer la part des profits dans la valeur ajoutée : Cf. la désindexation des salaires sur les prix (France, 1982). Ils vont même jusqu'à nationaliser des banques, ce qui revient à socialiser les pertes. En outre, le chômage (l'armée de réserve industrielle) pèse sur les salaires.
- la vision internationale du fonctionnement du capitalisme : le capital est apatride (poids accru des FMN, DIPP), internationalisation du capital (flux de devises, de capitaux à court et long terme en expansion).
Limites :
- pas de paupérisation absolue, ni même relative
- déclin numérique de la classe ouvrière alors que Marx avait prédit son ascension par l'intégration des commerçants, artisans, petits agriculteurs
- pas de BTTP : les profits des entreprises ont été restaurés dans la décennie 1980
- pas de tendance inéluctable à la concentration des entreprises : cf. l'essor des PME depuis le début des années 1980, elles sont à l'origine de la majorité des emplois créés
- mouvement massif de privatisation et d'arrêt des subventions dans le monde entier à partir des années 1980 : cela infirme l'idée de l'Etat-béquille
- effondrement des pays à économie centralisée et retour à la croissance dans les pays les plus libéraux (USA, GB, Australie, Nouvelle Zélande, Irlande)
- développement accéléré des pays pauvres qui se sont insérés dans les échanges internationaux, ce qui infirme la thèse de l'échange inégal
La crise des années 1930